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Entretien avec… Ousmane Ndiaye (ancien Directeur technique national) : "Le principal problème du sport sénégalais, c’est l’implication politique de l’Etat"

Le basket sénégalais est plongé, depuis quelque temps, dans une zone de turbulence.Une crise amplifiée par le bras de fer qui oppose le président de la Fédération Baba Tandian et le coach des ‘Lionnes’, Tapha Gaye.Un bras de fer dénoncé par Ousmane Ndiaye, ancien Directeur technique national (Dtn).‘Ce bras de fer n’a pas sa raison d’être. Parce qu’il ne milite pas pour le développement du basket sénégalais’, tonne-t-il. Dépité par cette situation qui mine la grande famille du basket sénégalais, il invite les responsables à se retrouver autour de l’essentiel : s’unir pour développer le basket sénégalais. Ancien directeur de cabinet des ministres des Sports : François Bop, Landing Sané, Abdoulaye Makhtar Diop, Ousmane Paye, Ousmane Ndiaye est bien à l’aise dans son sujet.Entretien...

Donald NDEBEKA Wal Fadjri



Entretien avec… Ousmane Ndiaye (ancien Directeur technique national) : "Le principal problème du sport sénégalais, c’est l’implication politique de l’Etat"
Wal Fadjri : Comment avez-vous accueilli le rappel à Dieu d’Alioune Diop qui fut votre encadreur (l’entretien s’est déroulé au lendemain de la mort d’Alioune Diop). Que retenez-vous de l’homme ?
Ousmane Ndiaye : Avec beaucoup de tristesse. Alioune Diop ‘Lune’ était un ami, un confident. Il a été l’un des premiers internationaux sénégalais. Des internationaux qui ont joué pour l’équipe de France. Alioune était d’abord mon partenaire de jeu. On a joué ensemble en 1963. A l’époque, il était plus âgé que nous. On l’avait fait venir de la France, en 1963, pour prendre en charge l’équipe en remplacement d’Eugène Moreira. Mais, avant le départ de ce dernier, Lune a joué avec nous. Il était notre capitaine et en même temps assistant d’Eugène Moreira. Avec lui, nous avons été qualifiés en finale des Jeux de l’Amitié. On avait joué cette finale contre la France. Alioune Diop était un grand joueur, un grand éducateur. De partenaire de jeu qu’il était, il est devenu ensuite notre entraîneur. J’ai cheminé avec lui de 1963 à 1965. Après un tour en France, je suis rentré en 1970. Alioune Diop s’occupait des équipes nationales avec Bonaventure Carvalho chez les filles. C’est ainsi qu’il a gagné en 1972, le premier championnat d’Afrique chez les garçons à Dakar. Il était un très grand entraîneur. Il a même entraîné la sélection d’Afrique qui était allée à Mexico dans les années 70. C’est un homme de terrain très ouvert qui connaissait bien le basket sénégalais. Son rappel à Dieu constitue une grosse perte pour le basket sénégalais.
 
Son rappel à Dieu coïncide avec une crise que traverse, depuis quelque temps, le basket sénégalais. Il y a notamment une brouille entre le président de la Fédération, Baba Tandian et l’entraîneur de l’équipe nationale féminine, Moustapha Gaye.Il n’y a pas de crise au basket. Il se pose juste un sérieux problème au niveau des hommes qui managent le basket sénégalais. Cette querelle de personne, par presse interposée, n’a jamais été le cas à l’époque.
 
Qui serait, selon vous, le principal responsable de cette situation conflictuelle qui mine le basket sénégalais ?Le responsable de cette situation, c’est celui qui a dit des choses qui ne sont pas conformes à ce qui s’est passé. C’est tout ! Toutes les joueuses ont dit que le coach leur avait intimé l’ordre de rejoindre les chambres après le dîner. Maintenant, quelqu’un a dit que les filles n’ont pas dormi. Qu’elles se sont mises à réclamer des primes jusque tard dans la nuit. D’où cette personne a reçu cette information ? Le fautif, c’est peut-être celui qui l’a informé. C’est pourquoi je dis souvent que, quand on est dans un groupe, on est une équipe. On ne fait pas des déclarations sur des choses qui n’ont pas été vérifiées au préalable.
 
L’allusion renvoie au président Baba Tandian, parce que, c’est lui le premier à avoir fait une sortie dans presse après la finale.
On n’a pas besoin de pointer du doigt le coupable. Il est connu de tous. Il est seulement très regrettable de voir des responsables, d’un certain niveau, envahir les médias pour engager la responsabilité d’untel ou d’untel autre sur un échec qui est une œuvre d’un collectif.
 
Avec cette guéguerre par presse interposée, la cohabitation est-elle encore possible entre Baba Tandian et Tapha Gaye ?Pourquoi pas ? Les deux sont égaux. L’un (Tapha Gaye) est un technicien, un ancien international de basket. C’est quelqu’un qui connaît bien ce qu’il fait. Le Président Baba Tandian est aussi un ancien basketteur qui est devenu administratif. Par contre, celui-ci doit oublier qu’il était un basketteur. Il doit plus prêter l’écoute à ses techniciens. S’il a quelque chose à dire à son technicien, qu’il le dise dans un cercle restreint. Mais, quand cela sort en public, automatiquement ça engendre des problèmes. C’est ce qui s’est passé au retour du Mali. Si les deux hommes se concertent, les choses peuvent s’arranger. Mais, s’ils continuent à se parler par presse interposée, ils ne pourront pas continuer à vivre ensemble.
 
Mais, avec la forte personnalité que chacun d’eux incarne, est-il possible de penser à des retrouvailles ?
Il faut justement chercher à mettre de côté cet ego pour l’intérêt de ce qu’on a en commun. Ce qu’ils ont en commun, c’est le basket sénégalais. Il faut alors que le monde se retrouve et discute. Il faut que tout le monde se mette autour d’une table pour faire le bilan. Après le bilan, si le coach est fautif, on le lui dit. Si, c’est l’administratif qui est attaché à l’équipe, on le ramène à sa place. (…) Après avoir situé les responsabilités des uns et des autres, ils doivent aussitôt passer l’éponge pour se remettre au travail.‘Pour la finale à Bamako, je me suis même posé la question de savoir si le contrôle antidopage était fait. Parce qu’on peut être dopé psychologiquement. On peut aussi être dopé autrement. En tout cas, les Angolaises avaient plus de motivation que les Sénégalaises pour gagner’.
 
En tant qu’ancien Dtn, quel conseil donnerez-vous à Ado Sano (actuel Dtn) sur le sort de Tapha Gaye ?
Je fais d’abord un bilan avec lui (Tapha Gaye). Si, j’ai des reproches à lui faire, je le fais en toute discrétion. (…)
 
A l’époque quand vous étiez directeur technique national, comment gériez-vous ce genre de situation ?
Il y a toujours eu des divergences entre la gestion technique du basket et la gestion administrative. Cependant, les techniciens à l’époque étaient au-dessus de l’administration dans la conception et la conduite des choses. L’administration était toujours là pour accompagner et appuyer. Mais, ceci n’est plus le cas. Aujourd’hui, il n’y a pas de symbiose entre le staff technique et l’administration du basket. Cela crée forcément des situations de ce genre. Quand je lis dans les journaux, un président de Fédération dire : ‘Si tel est entraîneur est là, moi je ne serai pas président de la Fédération’. Je dis non. Il aurait pu dire l’inverse : Moi, je suis président de la Fédération donc, cet entraîneur-là, je ne peux pas marcher avec lui, je le dégage’. Cela veut dire qu’il y a un problème de management dans le basket sénégalais qu’il faut régler.
 
Un éventuel départ de Tapha Gaye ne risquerait-il pas d’engendrer des conséquences regrettables chez les ‘Lionnes’ qui sont appelées à prendre part au prochain tournoi préolympique ?
Je ne peux pas préjuger sur l’avenir. Je peux aussi dire que nul n’est indispensable. Un championnat d’Afrique, c’est tous les deux ans. Il y a une équipe qui est là et qui a la rage de gagner. Si on n’a pas quelqu’un qui a l’expérience de deux ou trois compétitions, si on emmène un nouveau, cela peut créer des problèmes. Il n’y a pas de génération spontanée. Une équipe se construit dans le temps. Les joueuses actuelles se connaissent. Il y a juste eu un disfonctionnement qui a fait qu’elles ont perdu la dernière finale à Bamako contre l’Angola.
 
En tant que technicien, comment expliquez-vous cette défaite des ‘Lionnes’ qui avaient jusque-là fait un sans-faute ?
Je n’étais pas trop surpris par cette défaite. Je l’avais d’ailleurs un peu envisagée. Quand l’Angola a gagné le Mali, j’ai dit à mon épouse : ‘Attention ! le Sénégal doit se méfier de l’Angola.’
 
Pourquoi ?
Les Angolaises avaient plus de motivation que les Sénégalaises pour gagner.
 
Ne pensez-vous pas que l’environnement des ‘Lionnes’ doit être assaini ?
Je suis pour. Il faut nettoyer. Surtout quand vous avez un monsieur (Abou Dia, chargé de mission à la direction technique nationale de basket, Ndlr) qui vit en France et qui se permet de faire des déclarations insensées dans la presse. Comment quelqu’un peut dire qu’il y a eu des problèmes de mœurs dans l’équipe nationale alors qu’il n’était pas à Bamako. Un monsieur de ce genre ne doit plus être dans cet environnement… J’approuve parfaitement le fait que la Fédération ait décidé de porter plainte. Il y a des choses qu’on ne dit pas gratuitement comme ça. Surtout quand on est en équipe pour gérer un groupe.
 
Quelle appréciation faites-vous de l’arrivée d’Abdoulaye Makhtar Diop au ministère des Sports ?
J’ai pratiqué le nouveau ministre Abdoulaye Makhtar Diop. Parce que, j’ai été son directeur de cabinet. Abdoulaye Makhtar Diop est un sportif. C’est quelqu’un qui connaît bien le département. Il l’a dirigé pendant cinq ans, de 1988 à 1993. S’il revient dans ce département avec sa méthode et ce qu’il connaît, je pense qu’il peut y avoir un plus dans la bonne marche du sport sénégalais.
 
L’espoir est donc permis…
J’ai toujours dit, en tant que technicien de ce département, que ce n’est pas les ministres qui font un département ministériel. C’est une équipe de techniciens. Le ministre est un manager. Ce qui donne les résultats, c’est la manière dont le ministre gère son équipe. Je pense qu’Abdoulaye (Makhtar Diop) est en mesure de manager l’équipe actuelle en place au ministère des Sports. Le principal problème du sport sénégalais, c’est l’implication politique de l’Etat. Je l’ai toujours dit. J’ai eu à travailler avec des ministres qui étaient politiques et d’autres qui étaient apolitiques.
‘J’ai toujours dit en tant que technicien de ce département que ce n’est pas les ministres qui font un département ministériel. C’est une équipe de techniciens. Le ministre est un manager. Ce qui donne les résultats, c’est la manière dont le ministre gère son équipe’
 
Quelle est la différence entre un ministre politique et celui qui est apolitique ?
C’est deux gestions diamétralement opposées. Avec le ministre politique, il y a une mainmise sur le département ministériel. Dès lors que les hautes autorités se mêlent à la gestion sur le terrain du sport, il y a tout le temps des difficultés. Ce que j’ai constaté depuis l’alternance ne rassure pas. Huit ministres en douze ans, quelle est la permanence dans le management ? Il n’y en a pas. Il y a certains fonctionnaires qui ont toujours l’habitude de dire : ‘On attend le ministre, on attend que le ministre définisse, fasse ceci ou cela’. S’ils sont attentifs, parfois ils engagent des projets et ils disent : ’On ne sait pas comment les choses vont marcher’. Ensuite, ils attendent. Des fois, ils ont même peur de sortir de leurs tiroirs les réflexions et les programmes. Il n’y a rien de tout ça chez un ministre apolitique.
 
QUI EST OUSMANE NDIAYE ?
C’est le premier plus jeune basketteur sénégalais, en 1957. Il n’a connu que deux clubs au Sénégal : Avenir de Saint-Louis (1957-1962) et Dakar université club (1963-1966). International de basket (1962-1970), il a participé à deux Championnats d’Afrique (1964 et 1965), aux premiers Jeux africains de Brazzaville de 1965 (Médaillé d’argent). Il a gravi ensuite tous les échelons : Entraîneur joueur au Thiès étudiant club (1970-1971), entraîneur des équipes féminines du Duc et de Bobigny (France), directeur technique régional (Thiès), coach adjoint des ‘Lionnes’ et directeur technique national (1974-1979). Il a été aussi arbitre international (1977-1990), puis président de la Commission fédérale des arbitres marqueurs et chronométreurs de basket-ball du Sénégal (Cfamc). Après le basket, Ousmane Ndiaye s’est engagé dans le champ politique. Actuellement, il est membre de l’Alliance des forces du progrès (Afp) de Moustapha Niasse.

Article rédigé par le Jeudi 27 Octobre 2011




1.Posté par Le grand le 03/11/2011 12:26
Nous t'admirons toujours grand, ton analyse pertinente de la situation actuelle du basket et du ministére des sports ne nous surprend pas. Dommage que le sport Sénégalais n'utilise pas des hommes de valeur de votre trempe !!! Longue vie à toi.

Un ancien arbitre que vous avez formé

2.Posté par Jusice le 04/11/2011 22:54
Et que dire de Baba Tandian qui a appelé ce monument du sport sénégalais pour l'insulter suite à cet article.

3.Posté par LE GRAND le 08/11/2011 20:35
Justice , si cela s'est passé , s'est regrettable. Car pour ceux qui connaissent ce monument du sport , ils savent que M. Ousmane Ndiaye est un homme humble ,respectueux et bien éduquer. Comme du reste toutes les personnes de sa trempe.
Dommage qu'il soit insulté pour avoir donné son point de vue sur la situation actuelle du basket.

4.Posté par assane THIAM le 21/02/2012 13:19
ATTENTION MONSIEUR ALIOUNE DIOP ETAIT ENTRAINEUR DE LEQUIPE DU SENEGAL DE BASKET EN 1968 ET A GAGNE SA PREMIERE COUPE DAFRIQUE DES NATIONS AU ET CONDUIT CETTE MEME EQUIPE QUALIFIEE AUX JEUX OLYMPIQUE DE MEXICO.SA DEUXIEME COUPE DAFRIQUE DES NATIONS CETAIT A DAKAR EN 1972 AVEC CLAUDE CONTANTINO COMME ASSISTANT JAI MARQUE LE DERNIER PANIER QUI A PERMIS A NOTRE PAYS DE REMPORTER LA DEUXIEME ET DETRE QUALIFIER AUX OLYMPIADES DE MUNICH 72.DE ASSANE THIAM CHAMPION DAFRIQUE ET OLYMPIEN

5.Posté par nicolas Olivier boissy le 08/07/2015 05:03 (depuis mobile)
Merci beaucoup pour ces informations!!! J'en utilise pour preparer mon project de memoire en licence 3 a l'INSEPS

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